Confronter théorie et pratique, en tirer des conclusions et des recommandations, voici la tâche à laquelle se sont attelés Jean-Edouard Colliard et Peter Hoffmann au sujet de la taxe sur les transactions financières. Une taxe dont l’idée est ancienne, elle avait été suggérée par Keynes puis par James Tobin à la fin des années 1970, mais dont la mise en pratique soulève toujours diverses questions.

Quels sont les effets d’une telle taxe sur la volatilité et la liquidité du marché ? Sur les prix ? Comment affecte-t-elle les intervenants ? A quels produits financiers doit-elle s’appliquer ? Est-elle source de revenus conséquents pour l’Etat ? Il est d’autant plus difficile de répondre à ces interrogations que le contexte est complexe : il n’existe pas un type de taxe sur les transactions financières, mais plusieurs. Il n’existe pas un marché unique sur lequel elle a été appliquée, mais une multitude de marchés mondiaux aux caractéristiques diverses.

Il est cependant essentiel d’apporter aujourd’hui des réponses à ces problématiques, alors que 11 pays européens réfléchissent à la mise en place d’une taxe commune. Des pistes de réponses apparaissent grâce à l’étude des taxes déjà instaurées dans le monde, mais les scénarios diffèrent parfois fortement. Ainsi, il ne parait pas judicieux d’appliquer à l’Europe les leçons tirées des taxes appliquées dans les pays émergents. En revanche, les expériences anglaises et françaises semblent plus proches des objectifs européens, quoique de moindre envergure.

L’ambition européenne d’une taxe globale sur les transactions financières semble être une erreur, et ce quel que soit son objectif. Certains ambitionnent de réduire la volatilité du marché, d’autres sont plus intéressés par les recettes potentielles. Mais dans un cas comme dans l’autre, il est fort incertain que la taxe sur les transactions financières remplisse les objectifs assignés. Il n’est pas question d’abandonner ces objectifs, mais de trouver les outils adéquats. Les recommandations des chercheurs pointent plutôt en faveur de droits de timbre si le but est de collecter de l’argent. S’il s’agit de limiter la volatilité, la solution passe par la régulation et non pas par la taxation. Finalement, la taxe sur les transactions financières serait-elle obsolète avant même sa mise en place à une échelle européenne ?

Jean-Michel Beacco, 
Directeur général de l’Institut Louis Bachelier